• On la trouvait plutôt jolie

    On la trouvait plutôt jolie

    "La boussole du monde s’était-elle simplement déréglée ?"  ****

    Depuis « Un avion sans elle » et « Nymphéas noirs », j’attends toujours avec une certaine impatience de découvrir ce que Michel Bussi a bien pu nous concocter, son imagination sans faille n’ayant à ce jour jamais été prise en défaut.

    Le titre « On la trouvait plutôt jolie » n’a pas manqué de faire résonner en moi la tendre chanson de Pierre Perret, celle où il raconte la jolie Lily venue de son plein gré faire les sales boulots à Paris pour échapper à une vie de misère. La Lily de Michel Bussi, c’est Leily Maal, émigrée malienne, courageuse maman de trois enfants, qui fait des ménages et qui vit dans un HLM de Port de Bouc. Tout comme Lily, Leily se rendra vite compte que l’on n’est pas tous égaux au pays de Voltaire et d’Hugo, surtout si l’on vient de l’autre côté de la Méditerranée…

    Car étonnamment, c’est la crise des migrants qui sert de toile de fond à ce roman : l’auteur n’hésite pas à pointer du doigt la déshumanisation d’un système, l’indifférence générale (« Une quinzaine de corps noyés repêchés dans l’eau, dix autres cadavres échoués dans la boue. Passons maintenant à la météo. ») et l’inhospitalité des prétendues terres d’accueil : « Les fous qui étaient morts pour passer le mur, de l’est à l’ouest, étaient devenus des héros, des résistants, des martyrs ! Ceux qui tentaient aujourd’hui de franchir la frontière, du sud au nord, attirés par le même Occident, par les mêmes démocraties, étaient au mieux des hors-la-loi, au pire des terroristes. Question de nombre ? de mode ? de couleur ?  de religion ? Ou la boussole du monde s’était-elle simplement déréglée ? »

    Mais que les amateurs de romans policiers se rassurent, on est bien dans un roman de Michel Bussi, avec ce que cela suppose de manipulation et de contradictions apparemment insolubles. Indépendamment de ces réflexions humanitaires (toujours les bienvenues dans le contexte actuel), ils y trouveront leur compte : des chambres d’hôtel à vocation libidineuse qui deviennent des scènes de crime, des hommes qui paient de leur vie la recherche d’un moment de plaisir, des personnages cyniques qui profitent sans vergogne de la détresse d’autrui… et en arrière-plan le passé douloureux de Leily, qui se dévoile peu à peu et qui pourrait expliquer bien des choses. 

    Alors qu’il pense percevoir très vite la direction que prend l’intrigue, le lecteur voit rapidement basculer ses certitudes et réalise qu’il n’avait pas tout (voire rien) compris  -j’admets avec plaisir m’être fait avoir smile. Un très bon moment de lecture et un roman qui permet une nouvelle fois à l’auteur de se diversifier tout en conservant les ingrédients qui ont fait son succès.


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