• Un roman à la fois drôle, tendre et émouvant ****

    J’ai découvert Virginie Grimaldi grâce aux groupes de lecture sur Facebook, où cet auteur faisait souvent l’objet de commentaires élogieux. J’ai abordé son nouveau roman, « Le parfum du bonheur est plus fort sous la pluie », sans avoir lu les deux premiers et sans a priori particulier, si ce n’est la crainte de me perdre dans un récit mélodramatique émaillé de clichés.

    Le point de départ du récit aurait en effet pu donner lieu à des débordements larmoyants (et j'ai horreur de celaarf) : Ben vient de mettre un terme à son mariage avec Pauline et cette dernière, ne parvenant pas à faire face à la réalité, décide de lui écrire chaque jour un souvenir de leur histoire commune, espérant ainsi ranimer la flamme et le reconquérir. "Ne me quitte pas", c'est très joli lorsque le poète parle de terres brûlées et de ciel qui flamboie mais cela peut vite devenir horripilant sous une plume moins subtile. Tel n'est pas le cas, rassurez-vous smile

    Pauline est retournée chez ses parents avec son petit garçon, Jules, et les circonstances la conduiront à Arcachon pour des vacances familiales, dans la grande maison qui la faisait rêver lorsqu’elle était petite fille et qui appartient désormais à sa sœur à la vie si parfaite. Le lecteur découvre alors le reste de la famille, savoureuse galerie de portraits qui permet à Virginie Grimaldi d’aborder de multiples thèmes (la séparation, les relations familiales, l’alcoolisme, le deuil, le couple, l’homosexualité), les failles secrètes de chacun se dévoilant peu à peu au détour d’une anecdote, d’une conversation, d’un écrit. Le récit alterne la vie actuelle de Pauline et les souvenirs qu’elle envoie à Ben, par lesquels elle lève peu à peu le voile sur leur passé commun et leur amour.

    J’ai beaucoup aimé ce livre car l’auteur a réussi à me faire rire et à m’émouvoir en même temps, ce qui relève du parcours du funambule. L’écriture de Virginie Grimaldi est fluide, vive et enjouée et elle aborde des thèmes universels d’un ton tantôt grave, tantôt léger mais sans jamais verser dans le pathos. Elle nous fait passer du sourire à la tristesse sans transition, au fil d’un roman très plaisant où l’on ne s’ennuie pas un seul instant et dont le joli message pourrait être : « ce n’est pas parce que ça ne finit pas comme on le veut que ça finit mal ».

     

    Un roman plein de tendresse et de fraîcheur, dans lequel chacune se reconnaîtra à un moment ou l’autre de sa vie (je pense en effet qu’il s’agit d’un roman de femme pour un lectorat féminin) et qui plaira sans nul doute aux fans d’Agnès Ledig. A découvrir smile

     

     

    Du même auteur:

    Et que ne durent que les moments doux

     


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  • Into the WaterCeci n'est pas "La fille du train"... et c'est très bien ainsi ****

    Il était difficile de présenter un nouveau roman après le succès phénoménal de « The Girl on the Train », la comparaison s’avérant inévitable, mais Paula Hawkins a relevé le défi en nous proposant un second thriller réussi, bien que différent du premier.

    « Into the Water » est une histoire à facettes multiples, le point commun des différents récits étant « the Drowning Pool », cet endroit où la rivière est devenue piège mortel pour de nombreuses femmes au fil des siècles. Lieu de suicide ou endroit commode pour se débarrasser de celles qui dérangent, tel est le mystère qui n’a jamais été vraiment résolu et sur lequel a décidé d’enquêter Nel Abbott. Mal lui en prit car la rivière ne fut pas plus indulgente envers elle qu’envers Libby, trois cents ans auparavant, ou encore envers la jeune Katie bien plus récemment…

    L’histoire en elle-même est un « whodunnit » assez classique, l’alternance des perspectives d’une dizaine de personnages en faisant un puzzle fragmenté. Certains lecteurs se sont plaints de la confusion engendrée mais personnellement, cela ne m’a guère dérangée : le nom du narrateur figure clairement en tête de chaque chapitre et il suffit de quelques secondes pour se remémorer de qui il s’agit et quel est son rôle dans l’histoire. Ainsi que l’indique le titre, l’eau est un motif récurrent tout au long de l’histoire, les noyades tragiques émaillant le récit et chacune étant porteuse d’une histoire de femme.

    Le roman aborde de nombreux thèmes, à la fois banals, universels et émouvants: la violence conjugale, l’infidélité ou encore le regard impitoyable de la société sur les mœurs qui ne se conforment pas à ses prescrits.  Mon seul regret est que les personnages et leurs destins, du fait de la multiplicité, ne soient pas vraiment approfondis et je ne peux m’empêcher de penser que cette même trame, sous la plume d’Erin Kelly ou de Kate Morton par exemple, aurait donné une œuvre littéraire plus forte.

     

    Cela étant, il s’agit d’un bon roman policier à énigmes, servi à la fois par une atmosphère particulière et les fausses pistes et rebondissements de rigueur, ce qui en fait un agréable moment de lecture.


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  • Le chercheurUn voyage ésotérique qui ne m'a pas emportée **

    Je tiens tout d’abord à remercier Babelio et les éditions Flammarion de m’avoir fait parvenir ce livre en échange d’une critique honnête.

    « Le chercheur » s’adresse à un public particulier car il s’agit d’un récit et d’une quête initiatiques: l’ouverture spirituelle de l’auteur, le musicien danois Lars Muhl, alors qu’il traverse une période sombre de sa vie, « la nuit noire de l’âme ». Sa rencontre avec un être étrange qu’il nomme le Voyant l’emmène en voyage, tant physiquement que spirituellement, sur les traces des Cathares et à la découverte de lui-même. Le récit alterne le voyage présent vers le sud de la France et les souvenirs du parcours passé, alors que le narrateur tente de retrouver un équilibre intérieur au fil de découvertes mystiques.

    Mon impression globale après avoir terminé ce livre est mitigée. D’une part, ce livre contient des réflexions intéressantes, à défaut d’être originales, sur la vacuité de nos vies et nous fait entrevoir un ailleurs spirituel. Les hommes d’affaires pressés qu’il croise dans le train sont des « hommes-Magritte » qui font de leur mieux pour paraître importants, l’homme « s’invente une série de buts vers lesquels tendre. Mais ces buts ne sont rien d’autre qu’un alibi pour continuer à fuir et maintenir un haut degré de consommation » ou encore « l’homme a fait de la sexualité un divertissement destiné à combattre l’ennui. Notre culture a épuisé le concept d’amour. ». Dans le même ordre d’idées, notre combat pour accomplir nos rêves et nos ambitions, s’il est beau et émouvant, est également triste car nous emmenant loin de notre destin, l’être véritable ne pouvant « advenir que du non-être, de la même façon que le son ne peut venir que du silence ».

    D’autre part, - et c’est de là que vient le problème, selon moi- ,  ces idées se perdent dans une expérience ésotérique qui ne m’a pas touchée. Le parcours de Lars Muhl est peut-être trop personnel pour pouvoir être ressenti par son lecteur (qui doit, soit dit en passant, faire preuve d’une bonne dose d’ouverture d’esprit) et de ce fait, je n’ai pas eu l’impression d’emporter quelque chose en quittant ce livre (à part peut-être la découverte de la chanson de Jacques Brel « Je ne sais pas », dont les paroles sont retranscrites dans le livre et qui, elle, m'a touchée).

    Ce livre a déjà rencontré un certain succès au Danemark et a été traduit dans de nombreux pays, ce qui me donne à penser qu’il existe un public friand de ce type de lecture. En ce qui me concerne, tout en le lisant avec facilité et sans déplaisir, je suis restée à distance, lui préférant « Le pouvoir de l’instant présent » d’Eckhart Tolle ou des ouvrages de méditation qui me donnent des conseils pratiques pour vivre personnellement l’expérience (Christophe André par exemple). Il ne s’agit cependant que de la première partie d’une trilogie et les deux suivantes seront peut-être un complément intéressant.

     

     


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  • Ce qui se dit la nuit"Ce qui se dit la nuit ne voit jamais le jour" ****

    J’ai découvert le premier roman d’Elsa Roch, « Ce qui se dit la nuit », au hasard du fil d’actualité d’un groupe de lecture et j’ai été très agréablement surprise par ce roman policier d’atmosphère qui nous emmène, au gré d’une plume très séduisante, dans les sombres secrets d’un petit village français.

    Alors que le commissaire Amaury Marsac vient tenter de se ressourcer sur les lieux de son enfance et de ses amours perdues avec la belle Elsa, un terrible drame secoue le village : une dame âgée, Marianne Touret, est retrouvée égorgée, tondue, un morceau de tissu cousu à l’emplacement du cœur. Amaury se sent émotionnellement impliqué par la mort de cette personne qui a compté pour lui et s’investit dans l’enquête contre l’avis de l’enquêteur local, mettant à nu non-dits et sentiments inavoués.

    L’histoire est assez simple voire ordinaire et pourtant, le lecteur se laisse emporter par ce récit villageois où chacun semble avoir l’un ou l’autre secret. Elsa Roch a réussi à créer une atmosphère glauque, entre brumes opaques et vieilles superstitions, qui donne un cachet particulier à la narration. Le prologue nous emmène sans ménagement dans la tête d’une petite fille de cinq ans, détenue dans le block des enfants d’un camp de concentration, plantant ainsi dès les premières pages une sordide toile de fond, avant de nous laisser entrer dans l’histoire en elle-même. Chaque chapitre est précédé d’une courte phrase qui s’y retrouvera plus tard et le récit est émaillé de citations de Philippe Léotard qui contribuent à l’ambiance particulière de l’ensemble (« Si je me suis trompé en disant : je t’aime, je préfère avoir dit : je t’aime. On ne me fera pas envier celui qui a eu raison sans aimer. »).

    Les personnages sont attachants par leur fragilité et leur humanité, en proie à leurs démons ou réminiscences douloureuses : une sœur disparue, une enfance martyrisée, des êtres écorchés par une vie professionnelle  au contact permanent des noirceurs de l’âme.

    Enfin, j’ai beaucoup aimé l’écriture d’Elsa Roch, étonnamment aboutie pour un premier roman : le soleil se couche « en un lugubre écroulement de nuages sanglants », la Creuse « scintillait de mille feux, magnifique, indifférente, gloutonne. Ses enfants perdus, elle les avalait sans un mot sans un regard sans un cillement » ou encore « On est toujours seul face à la mort, mais, parfois, cette solitude résonnait comme une stridence infinie. »

     

    Un beau roman d’atmosphère et une belle découverte qui laisse espérer une suite aux enquêtes du commissaire Marsac.


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  • He Said / She SaidHe Said / She SaidOmbres et lumières *****

    J’avais découvert Erin Kelly grâce à son premier roman, « The Poison Tree », dont j’avais aimé les accents rendelliens, et « He Said/She Said » m’a séduite encore davantage, alliant à la fois atmosphère, suspense constant et qualité d’écriture.

     

    Alors que de nombreux romans à suspense se ressemblent au point de ne plus se distinguer les uns des autres, Erin Kelly nous emmène dès les premières lignes dans le monde particulier et fascinant des chasseurs d’éclipse, articulant la construction de son récit sur les cinq phases d’une éclipse (first contact, second contact, totality, third contact et fourth contact) et utilisant cette dernière comme métaphore des jeux d’ombres et de lumières omniprésents dans la narration.

    Cette narration se fait du point de vue alterné de deux protagonistes, Kit et Laura, à deux époques différentes. Lors de l’éclipse du 11 août 1999, Kit et Laura se rendent en Cornouailles pour assister au spectacle et y rencontrent une jeune femme, Beth, dans d’étranges circonstances qui changeront le cours de leurs vies ; ces événements seront suivis d’un procès en l’an 2000 mais je ne vous dirai pas pourquoi smile En 2015, Kit se prépare cette fois à partir seul aux îles Féroé pour assister à une nouvelle éclipse, Laura, enceinte, restant seule à Londres. Les deux jeunes gens vivent manifestement dans la crainte, au point d’avoir changé d’identité, et ils mettent tout en œuvre pour ne pas pouvoir être retrouvés  -ce qui est compromis par la présence connue de Kit aux éclipses. Qui craignent-ils et pour quelles raisons… c’est ce que vous découvrirez au fil du roman.

    Ainsi que l’indique le titre, « He Said/She Said » joue sur l’impossibilité de concilier deux versions des faits et de trancher. Tout au fil de l’histoire, le lecteur se voit confronté à des récits qui semblent parfois s’accorder avant de prendre une tout autre direction et de mettre à mal ses certitudes. L’intrigue est très ingénieuse et présentée de manière à nous surprendre tout au long du récit suivant les époques et les narrateurs.

    Par ailleurs, Erin Kelly fait preuve d’une grande maturité d’écrivain en prenant le temps de camper ses personnages et ses décors  -j’ai lu que certains lui reprochent une lenteur dans la mise en place mais personnellement, je considère que c’est une qualité par rapport à des romans qui se contentent de narrer les faits tels quels- et elle a en outre une écriture soignée, avec des formules qui font mouche. A titre d’exemple, elle décrit avec élégance la fascination face à une éclipse (« as if a giant hand had reached down from the sky and touched me ») et exprime de manière percutante la honte d’un personnage face à ce qu’il est en train de faire : « <…> and even the devil on my shoulder turned his back in disgust ».

    Vous aurez compris que je vous recommande chaleureusement ce roman, qui m’a passionnée de bout en bout au point d’avoir du mal à le quitter et qui plaira aux fans de Kate Morton, Katherine Webb ou encore Ruth Rendell.

     

     


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